La trahison des images – Le principe
d’incertitude – Variante de la tristesse
Oui, ce n’est pas une pipe, c’est
une représentation, ce n’est pas l’objet réel mais la représentation
personnelle d’un objet usuel. Voilà comment très simplement Magritte nous
permet de comprendre la différence entre représentation de mot (système représentatif du langage,
système clos qui comporte les mots de l’écrit et du parlé) et
représentation de choses (système
représentatif de choses, système illimité composé d’éléments visuels, tactiles,
kinesthésiques, acoustiques), et le décalage entre la représentation et
le réel. Pour aller vite, le mot n’est pas la chose et les images et les
choses, ce ne sont pas les mêmes choses !
La preuve par l’image :
cette image de femme dont l’ombre représente un oiseau. Infidélité de l’image à
l’égard du réel, Magritte le dit lui-même : « On ne peur pas dire
avec certitude, d’après l’ombre d’un objet, ce que celui-ci est en réalité ».
A cela s’ajoute le fait que le peintre a tout loisir de jouer avec les images. La
représentation de chose n’est pas la chose elle-même, je peux donc à loisir
trafiquer l’image, elle n’est pas le réel. Vive le surréalisme ! Vive l’art
qui permet de mettre une distance avec le réel. Un film, une pièce de théâtre,
un tableau, c’est pour de faux, même quand on me raconte une histoire vraie !
Et pourtant je vis cela comme une réalité, je suis émue, quel bonheur de me
faire tromper ! Je suis toujours partante pour être embarquée par une œuvre,
même si c’est comme nous le disions enfant « pour de faux », mon
cerveau s’agite volontiers comme dans la réalité.
Et il s’agite beaucoup quand il
cherche à savoir qui de l’œuf ou de la poule est venu en premier, sur ce
mouvement perpétuel avec sa logique implacable qui associe le début de toute
chose à sa fin, sur le triste devenir d’un œuf qui, passé trois minutes, ne
deviendra jamais poule mais sera mangé avec des mouillettes de pain, triste
poule confrontée à l’énigme de la vie !